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Recruter, un parcours semé d’embûches

21/03/2019

Actus Agricoles

Parce qu’être employeur est devenu un job à part entière. Et que recruter, préparer les entretiens, rédiger les contrats, organiser le temps de travail, les congés ou prévenir les risques ne s’improvise pas, le cabinet Altonéo, membre d’AGIRAGRI, a organisé le 7 février un débat, animé par Rosanne Aries de La France Agricole. Il a réuni près de 200 personnes, au lycée agricole de Laval (Mayenne).

Suite au départ d’un associé, Pierre Besançon, 43 ans, installé à Saint-Berthevin avec son épouse sur une exploitation en polyculture-élevage, a été confronté à un dilemme : rechercher un nouvel associé ou recruter un salarié. « Le choix de l’associé est souvent plus simple pour l’organisation du travail et le partage des responsabilités. Avec un salarié, on a un certain nombre de contraintes réglementaires qui peuvent ralentir les choses. » Mais diverses expériences avec plusieurs associés l’ont amené à revoir sa position. « On a cherché quelqu’un de polyvalent qui irait sur tous nos ateliers : volailles, bovins lait, cultures, méthanisation… » Ils ont d’abord embauché une femme en bac pro qui avait fait un BTS en alternance chez eux. Mais, elle les a très vite quittés pour s’installer. Ils ont trouvé un autre jeune qui, en 2016, est parti lui aussi. Dans un contexte familial difficile suite au décès accidentel d’un enfant, « cela a été très dur. On a été tout seul pendant un an ». Puis, ils se sont relancés dans leur recherche. Alors qu’ils travaillaient à la rédaction d’une fiche de poste, ils sont tombés sur l’annonce d’un ancien agriculteur qui vendait sa ferme. « Les jeunes quand ils sont bons, ils veulent s’installer ou faire autre chose. Alors l’idée d’embaucher quelqu’un de notre âge, stable, a fait son chemin ». Frédéric est arrivé en avril 2017.

Le délicat choix du profil

Une chance, car la recherche est difficile. En 2018, l’association départementale pour l’emploi et la formation en agriculture (Adefa) de Mayenne a reçu 220 offres d’emploi. Un chiffre en hausse de 50 % par an depuis trois ans, témoigne Charlène Lebayon. Les demandes émanent de toutes les productions, mais principalement des élevages de bovins lait. « La moitié des offres ne sont pas pourvues », reconnaît la conseillère.

Sur le terrain, chacun y va de sa solution. Pour Céline Déforges, c’est le bouche-à-oreille qui a fonctionné. A 44 ans, elle a rejoint l’exploitation de son mari en 2016, après avoir été conseillère installation-transmission pendant plus années. Ils sont en Gaec laitier dans la commune de Bourgon. Céline est venue remplacer un des 3 associés du Gaec. Un an après son installation, le deuxième associé a pris sa retraite. Ils ont alors cherché un salarié. Ils ont opté pour un apprenti, recruté avec un voisin dans le cadre d’un groupement d’employeurs, car un apprenti ne peut avoir légalement qu’un seul employeur. « On n'était pas sûr à l’époque de l’enveloppe financière que l’on pouvait dédier à un salarié car on avait des investissements à prévoir et un projet de conversion en bio ». Finalement, ils ont trouvé beaucoup de souplesse dans cette organisation. Et pour le salarié, c’est plus simple et plus sécurisant d’avoir un seul employeur plutôt que deux à mi-temps.

Jean-Paul Garrot, installé en lait bio avec son épouse à Pommerieux, a de son côté choisi la Cuma qu’il préside pour résoudre son problème de main d’œuvre. « J’ai un tout petit système – 55 vaches – qui ne me permet pas d’avoir du matériel, donc je délègue tout à la Cuma. La main d’œuvre allait de pair ». La Cuma des Ponts emploie trois salariés pour 40 adhérents réguliers sur 120 inscrits. L’un travaille depuis 16 ans dans la Cuma, mais les deux autres ont été embauchés récemment. Pour eux-aussi, c’est le bouche-à-oreille qui a fonctionné. « L’année dernière, on a un gars qui s’en allait, et c’est lui qui a dit à d’autres qu’il faisait bon vivre dans cette Cuma. C’est déterminant ». Car quand on emploie plusieurs salariés, il faut aussi veiller à ce que les profils soient « compatibles ». Il faut également montrer la pérennité de son entreprise. « Pour convaincre les deux qui quittait une entreprise de travaux agricoles au sein de laquelle ils avaient travaillé pendant 15 ans, j’ai mis à plat les comptes de la Cuma. Une bonne assise financière permet de se projeter à long terme », assure-t-il. Charlène Lebayon approuve : « il faut mettre en avant les atouts de son entreprise dès la rédaction de l’offre d’emploi ».

L’enjeu de la fidélisation

Une fois recruté, toute la difficulté est de garder ce salarié. « Pour que cela fonctionne, il faut être dans la communication, constate Pierre Besançon. Expliquer, mettre le salarié à un atelier sur lequel il a de l’expérience, où il est en confiance, pour ensuite l’amener à développer ses compétences. Aujourd’hui, c’est facile, on a un discours assez libre, des points réguliers ensemble sur ses conditions de travail, son ressenti, ses idées. Quand on peut, on en tient compte ». Côté employeur, il faut apprendre à déléguer et à respecter les horaires, les vacances… « Les weekends d’astreinte, c’est le salarié qui endosse les responsabilités du responsable d’exploitation. C’est une reconnaissance de son travail ». Chez Céline Déforges et son voisin, avec qui elle a créé le groupement d’employeurs, c’est plus compliqué. Une exploitation est en bio, l’autre pas. Et à deux, les consignes sont forcément différentes. « On fait toujours les entretiens ensemble pour que ce soit le plus clair possible pour le salarié, souligne-t-elle. Et puis, il faut beaucoup parler entre employeurs. Accepter de donner ce temps-là, c’est un gain de temps futur. »

Dans Cuma des ponts, le travail est planifié tous les lundi matin. « Cela permet d’échanger entre agriculteurs et de donner une visibilité aux salariés », témoigne Jean-Paul Garrot, qui associe aussi ses salariés au processus de décision dans les choix de matériels. Ancien salarié lui-même, il sait ce que ressentent les salariés. « Je leur fais confiance, je leur dis quand le travail est bien fait. Il n’y a pas de rapport dominant-dominé ». Ce respect se retrouve aussi dans le salaire. « Certains agriculteurs ne comprennent pas que leurs salariés aient des revenus mensuels plus importants qu’eux. Mais ils n’ont rien d’autres et surtout, c’est le marché du travail ».

Un salarié coûte-t-il cher ? « En termes de trésorerie, oui, reconnaît Pierre Besançon. En revanche, en termes d’organisation, de fonctionnement, de vie tous les jours… Quand on peut se reposer sur quelqu’un en qui on a confiance, qu’on sait que le travail sera bien fait, qu’on peut se donner un peu d’air… ça n’a pas de prix ».

Evaluer le coût et les bénéfices d’un futur recrutement : 

Retrouvez l’interview vidéo de Jérémy Boisseau, expert-comptable associé au sein du cabinet Altonéo, membre d’AGIRAGRI

ICI

 

 

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